LA CAPOEIRA

Par Cécile Bennegent

 

Mélange de combat, de danse, et de jeu qui se pratique au rythme des percussions, la capoeira est l'art de lutter en dansant et de danser en luttant. Venant à l'origine de danses africaines pratiquées par différents peuples du continent noir c'est au Brésil que la capoeira est née et s'est développée. Jeu, lutte, danse, art, folklore, philosophie, elle est tout cela et plus encore. Créativité, improvisation, harmonie, poésie, fête, amusement, théâtralité, " malicia "... tous ces termes la caractérisent faisant d'elle un ensemble riche, un tout complexe qui n'a pas fini de surprendre.

Le jeu se déroule dans la " roda ", la ronde, cercle où toutes les énergies se rencontrent. Les capoeiristes évoluent aussi bien au sol qu'en l'air, défiant les lois de la gravité, élaborant un jeu improvisé avec des mouvements précis, harmonieux. A travers ce dialogue corporel, les adversaires cherchent à se tromper, à se surprendre par des feintes en tout genre, ce que l'on nomme en portugais la " malícia ".

Tout ceci en suivant le rythme sacré du " berimbau " (arc musical venu d'Afrique) et sous le regard attentif du maître qui saura calmer le jeu s'il devient trop violent, le stimuler si au contraire il est trop mou, par l'intermédiaire du rythme et du chant.

La capoeira enseigne à celui qui la pratique à mieux se connaître, à développer autant son corps que son esprit, à trouver à travers le jeu, son propre équilibre (physique et psychique). Elle enseigne le respect, la tolérance, la convivialité... Quand on joue la capoeira, on laisse parler son corps, ses émotions, on dialogue avec son partenaire qui est aussi l'adversaire.

 

UN BREF HISTORIQUE

Au XVIème siècle, des milliers d'esclaves noirs débarquent sur la côte brésilienne avec pour tout bagage ce qu'ils possèdent en eux : leur culture. Malgré les difficultés, les atrocités même (n'ayons pas peur des mots) que le peuple noir va connaître en terre américaine, malgré tous les interdits et l'imposition de nouvelles règles de vie..., les africains réussiront à cultiver leurs racines ancestrales, et avec les générations et le syncrétisme qui s'opère, naîtra une nouvelle culture : la culture afro-brésilienne.

 

La capoeira s'inscrit dans l'ensemble des manifestations afro-brésiliennes nombreuses au Brésil et principalement à Salvador de Bahia, première capitale brésilienne au temps de la colonisation, première terre d'accueil des africains et berceau de la capoeira. Après avoir traversée une longue période de répression au Brésil où elle a longtemps été associée à la marginalité, à la délinquance, elle est aujourd'hui reconnue pour toutes ses valeurs artistiques, culturelles, sociales, philosophiques...

Son évolution historique suivra celle de la société brésilienne et atteindra notre époque, différente de ce qu'elle était hier, certainement de ce qu'elle sera demain. Elle a conquis d'abord l'ensemble du Brésil en se répandant dans toutes les grandes métropoles du pays, puis les Etats-Unis et l'Europe et continue toujours à s'étendre et à se faire connaître et reconnaître dans divers pays du monde.

 

CAPOEIRA ANGOLA ET CAPOEIRA REGIONAL :

La capoeira, avant d'être légalisée, a, comme nous l'avons vu, connu de durs moments de répression. Il n'existait qu'une capoeira à l'époque. En 1930, maître Bimba crée un nouveau style qui s'appellera régional, du coup la capoeira traditionnelle prendra le nom d'angola pour la différencier de la nouvelle pratique. Ainsi aujourd'hui on entend parler de capoeira regional et de capoeira angola.

Quelles différences ?

La Capoeira Angola est la première a avoir existé. Elle se caractérise par un jeu près du sol avec peu ou pas d'acrobaties, mais surtout par sa malice. C'est le joueur le plus malin, celui qui par ses feintes parviendra à tromper l'adversaire, qui aura le dessus. Les joueurs jouent donc dans le sens théâtral du terme. Elle est souvent caractérisée à tord par un jeu lent. De part cette malice et parce qu'elle peut être aussi très rapide, la capoeira dite angola est très dangereuse et n'est accessible qu'à des joueurs déjà bien entraînés. La première académie de Capoeira Angola est ouverte par Mestre PASTINHA en 1941 (au Pelorinho à Salvador).

La Capoeira dite Régional est une adaptation de la première, originale. Mestre BIMBA, qui en est le créateur, a voulu, en créant le style de la Capoeira Régional, la rendre plus efficace, il aurait " rationalisé " les coups de capoeira, pour les rendre plus efficaces avec des entraînements très physiques. Elle se pratique sur un rythme rapide et est beaucoup plus acrobatique que l'Angola. Mestre Bimba a surtout créé une méthode d'apprentissage, avec des séquences d'entraînement. L'académie de Mestre BIMBA ouverte à Salvador en 1934 (également dans le quartier du Pelourinho) sera une première au Brésil. La capoeira est désormais autorisée par la loi, mais elle ne se pratiquera plus librement dans la rue mais dans les murs d'une académies exigeant un droit d'entrée.

Aujourd'hui, le plus souvent, les deux styles sont pratiqués ensemble dans les académies (ils sont finalement très complémentaires). Le style angola ouvre en général les rodas, puis le rythme du jeu devient São Bento grande et le style change avec la musique. Mais avec l'engouement qu'a connu le style regional, l'angola a presque disparu et est encore dans son style traditionnel très minoritaire. C'est pourquoi, encore aujourd'hui et principalement à Salvador (où la capoeira à toujours tenue une place particulière), certains maîtres se font défenseurs de la tradition, luttent pour préserver le style " pur " du jeu tel qu'il était pratiqué au début du siècle.

Pour conclure, il est certainement important de considérer la Capoeira, quelque soit son style, comme UNE, c'est-à-dire en voyant dans ces deux styles principaux, non pas une dualité mais une complémentarité.

 

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